Guy Muyembe

C’est l’heure du dîner

Dans des pays comme le mien la relation entre la politique et les autres secteurs de la vie est très ambiguë. Il ressort de mon constat que l’un vampirise l’autre. On a dès lors l’impression que tout un pays est exclusivement au service d’un seul homme. C’est à cela qu’on reconnaît une dictature, non?
Voici le troisième article d’une série consacrée aux relations que j’entretiens avec les médias locaux.

Bonjour Monsieur le ministre

Armoiries de la R.D.Congo
Armoiries de la R.D.Congo

Le moral blindé, j’essayais enfin de travailler sérieusement. J’ai passé une bonne heure à faire autre chose:
– Croquer une pomme verte( prêche d’un pasteur évangélique) de la part de « Radio Alléluia »;
– savourer un super sandwich au fromage( discours d’un tradi-praticien « capable » de guérir toutes les maladies) de la part de « Radio Cahin-caha »;
– déguster un peu de whisky( journal d’information) de la part de « Radio Méli-mélo ».
J’ai véritablement enfreins pas mal d’articles du règlement d’ordre intérieur durant cette heure là.
Mais je n’étais pas plus à blâmer que ce cher ministre d’État venu visiter la boîte, suivi par quelques courtisans ainsi que des journalistes. Il fallait cesser de travailler pour accueillir ce visiteur de marque.
Franchement je n’ai pas voulu m’associer à ce folklore. Je demandais alors l’autorisation de rentrer chez moi. Ce qui fut accordé.
Un accent Hollywoodien

wikimedia.org
wikimedia.org

Et dire qu’il était temps de prendre le dîner.
Mon plat principal devait être un long métrage réalisé par James Cameron ou un de ses contemporains.
Je m’en remettais pour ce faire à l’une de nos télévisions locales Une toute petite télévision non payante. Sa réception ne nécessite ni décodeur ni tout autre équipement particulier. Rien à voir avec les mastodontes diffusés par le câble ou par les satellites.
Vous avez tout compris! C’est bel et bien cette petite chaîne de télévision qui se permet de diffuser chaque semaine au moins un film à gros budget.
Bien entendu cela se fait au mépris de toutes les lois de protection de la propriété intellectuelle. Ne vous posez pas la question de savoir pourquoi l’État ne sévit pas contre une telle infraction. Il est trop défaillant pour le faire.
En tout cas ce n’est pas le médiavore Lushois qui s’en plaindrait. Lui qui, jadis, regardait certains films plusieurs années après leur sortie en salle à Paris ou à New York.
Remarquez à quel point son sort n’est pas moins enviable que celui d’un autre médiavore lambda.


À emporter

J’ai beau passer toute mon enfance dans une ville du sud je n’ai pas
moins les attributs d’un digne fils de la société de consommation. Je
constitue d’ailleurs une cible pour les entrepreneurs des pays dits
« développés » qui spéculent sur un renouveau économique de l’Afrique à
l’horizon 2050. Mais là n’est pas notre sujet.


Quoi donc?
À la fin de l’article précédent j’avais donc promis de continuer à
vous faire  quelques confidences sur une de mes journées…
On en était au moment où je finissais de prendre mon porridge avec
beaucoup de délectation. Non, non! Franchement j’ai aimé l’émission
animée par un certain DJ caméléon( NDLR, ceci est un pseudo).
Autrement je n’aurais pas pu écouter de sitôt le nouveau tube de Koffi
Olomide. Chez moi l’industrie du disque est tellement sinistrée que la
seule voix de recours pour les mélomanes est celle-là si ce n’est pas
l’achat des disques pirates.
Et que ça saute!

Téléphone huawei- wikipédia.org
Entre-temps la pendule avait indiqué 7:00. Il me restait très
exactement 30 minutes pour gagner mon lieu de travail à temps.
Pourtant ma table ne désemplissait pas.
J’emportais alors le reste jusqu’à mon bureau.
Comment? me demanderez-vous.
Vous avez sûrement déjà entendu parler de ces téléphones avec radio FM
intégrée. Pour le médiavore, que je suis, c’est la solution idéale
pour emporter son repas de lieu en lieu. Pour une fois je dirais merci
à la Chine: grâce à ce pays la fracture numérique n’est plus aussi
béante qu’au début du siècle. Il est loin le temps où le médiavore
occidental était le seul invité des festins offerts par Facebook,
Google et les autres stars de le cuisine numérique.
Sur mon lieu de travail

Pomme verte- pixabay.com
Pomme verte- pixabay.com

Je trouvai divers dossiers empilés sur ma table de travail. Mais je ne
pus résister à l’envie de croquer dans une pomme verte cueilli dans le
verger de « Radio Alléluia ». On trouve plein de vergers du genre dans
mon pays. Ils sont l’aboutissement de l’esprit entrepreneurial de
pasteurs évangélistes.
Si la pomme était savoureuse en revanche il m’avait semblé qu’elle
avait un goût particulier. Il fallait s’y attendre… les prêches
enflammées diffusées par les radios évangéliques locales ont toujours
une saveur particulière: la promesse d’une prospérité financière à
plus ou moins brève échéance.
Croire ou ne pas croire. La décision appartient à chacun de nous.
Pour ma part, je me garde de donner mon sentiment sur l’extraordinaire
percée des mouvements chrétiens évangéliques.
Vous aurez remarqué qu’on en est pas encore arrivé au moment où je
prends mon repas de midi. Permettez-moi de vous en parlez dans le
prochain article.


Je suis un médiavore

 

 

 

 

 

 

« Tu ne vivras pas de pain seulement. » Elle ne vient pas de moi celle-là. C’est une citation d’un célèbre prophète dont, laïcité oblige, je préfère taire le nom.

Il ne se croyait si bien dire.

Et alors

google.com
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Aujourd’hui l’être humain est un animal qui ne se nourrit pas que de viande et de plantes. Il mange aussi tous les biens dont l’existence matérielle n’est pas avéré. Vous imaginez une personne qui aurait de la bouffe à profusion mais à qui il manquerait un peu de musique par-ci, un divertissement par-là? C’est tout simplement inenvisageable.

Puisque l’homme est aussi mangeurs des médias je préfère le qualifier de médiavore. Dieu sait combien l’appétit de cet être s’aiguise devant un plat croustillant fait de révélations plus ou moins scandaleuses. Pas plus tard que cette année nous nous sommes régalés d’un plat baptisé « L’affaire Julie Gayet ». J’espère vous vous en rappelez la délicatesse.

Un Menu à Couper Le souffle

logo de la RTNC provincenordkivu.org
logo de la RTNC
provincenordkivu.org

Le mois dernier il m’était venu à l’idée de changer mes habitudes de consommation. J’avais tout faux. Lisez la suite de l’article et vous comprendrez.

Aux petites heures de la matinée je devais prendre mon petit-déjeuner. Je préférais commençais par une dose de caféine gracieusement servie par la bien nommée Radio Télévision Nationale Congolaise( RTNC).

Plus qu’un stimulant c’est comme une piqûre de rappel. La petite voix vous signale qu’un homme fort tient fermement les rennes du pouvoir. La seule alternative pour vous est de ne ps envisager la disparition du système de prédation mis en place depuis les indépendances. Rebutés, vous faîtes de tourner le bouton du poste.

A l’instant on vous sert un porridge savamment concocté par une des nombreuses « Radio-boomer » Vous connaissez peut-être ces radios créées de toutes pièces par des pontes pour des rasons électoralistes. Dès après la fin de la campagne électorale elles deviennent des outils à diffuser de la musique à longueur de journée.

Ce jour là un animateur radio faisait une émission sur la sortie du dernier album de Vieux Ebola… de Koffi Olomide, autant pour moi. C’était malin de sa part que de nous faire croire que l’album était joué en exclusivité. Je n’avais eu qu’une chose à dire alors: « vive le téléchargement et la diffusion illégaux d’œuvres protégées. »

j’étais loin de m’imaginer les préparations culinaires qui me seront servis le reste du temps. Mais de cela je préfère parler dans l’article à paraître au courant de la semaine prochaine.

 


Qui est aux Commandes?

Aux commandes de quoi? me demanderez-vous.
Ce n’est pas du poste de président de la République Démocratique Du Congo dont je veux parler. On sait qui est au commande de ce pays. On sait également à quel point la controverse autour de son probable 3è mandat fait couler encre et salive. Il y a de quoi dérouter mes lecteurs…


Ce n’est pas non plus du leadership du football africain dont je veux parler. On a encore en tête la dernière victoire des Léopards dont je veux parler. La match fut épique. De l’avis de beaucoup de fans, c’était d’autant plus extraordinaire que d’aucuns pariaient sur une défaite des nôtres. Face aux redoutables Éléphants de la Côte d’Ivoire rien n’est gagné d’avance.
Ma question se réfère plutôt à l’activité qui consiste à cuire les aliments pour toute la famille. Donc il a fallu être un peu plus explicite: Qui est aux  commandes des fourneaux?
Avant d’y répondre il faut se faire à l’idée qu’on se trouve dans une ville aux mœurs conservatrices. Eh oui! Si Lubumbashi était une terre d’Islam, elle vivrait probablement au rythme des décrets religieux d’un grand mufti. J’ai vu des jeunes filles en mini-jupes être huées, sermonnées et invitées à la mettre en veilleuse. Mais ce n’est pas pour autant que les membres de la « société des ambianceurs » n’y ont pas droit de cité. Vous pouvez me croire.
Ceci étant dit convenons que le genre de ménage le plus répandu à Lubumbashi est celui d’un homme avec femme et enfants. Ici le principe de la « division du travail » est de stricte application: Il revient à la femme d’effectuer les travaux ménagers et ,donc, de cuire les aliments. Il en sera ainsi tant que l’homme sera considéré comme le chef incontesté du ménage. Au grand dame de certains féministes parmi les plus radicaux.
Même dans les familles monoparentales gérées par des hommes on trouve toujours une femme aux commandes des fourneaux. Il peut s’agir d’un membre de famille ou d’une personne tierce. En tout cas le maître de maison n’oserait pas garder les clés de la cuisine.
Il faut aller parmi les hommes célibataires pour faire la découverte d’une cuisine qui se conjugue au masculin. Ils sont jeunes étudiants venant d’autres régions ou novices dans telle ou telle branche d’activité. Ils ont rarement la quarantaine. A propos, il ne fait pas bon être célibataire endurci à Lubumbashi. Ce n’est pas Georges Clooney, le « tout jeune marié », qui m’en dirait le contraire.
Pour terminer’ je promets un prochain article sur ces hommes qui font la cuisine. Je crois qu’il y a tant de choses à dire à ce propos.


Qu’est-ce qu’un bon Citoyen?

 

Je présume que dans tous les pays, le cursus scolaire prévoit que les apprenants puissent être préparés à leur rôle de citoyen. C’est le bien fondé du fameux cours d’éducation Civique. Au nombre des matières dispensées aux élèves figurent des concepts comme le nationalisme, le patriotisme, l’État et le sens du devoir.

En effet, comme cela n’est pas toujours remarquable et remarqué, ce sont parmi les principes fondateurs des sociétés modernes. Les citoyens doivent pouvoir s’en imprégner afin de développer chez eux le sentiment du vivre en commun. C’est ce même sentiment qui préside à la pérennité de la société.

On n’imagine pas un État qui laisserait ses citoyens ignorants de ce genre de chose. Son existence même en serait affecté.
Dès lors sera considéré comme bon citoyen  la personne qui aura assimilé cela en le traduisant par ses actes. A l’opposé le mauvais citoyen est celui qui s’en moquerait.
Cependant beaucoup de ces concepts semblent avoir perdu de leurs vigueurs depuis le milieu du 20è siècle. C’est à cette période que les États ont pris conscience de la nécessité de ne plus se définir uniquement par eux-mêmes. D’où la naissance des organisations supranationales comme l’ONU, l’UE ou encore la défunte OUA.
Bien plus les concepts dont il est question montrent leurs limites face à certains enjeux de l’heure comme la sauvegarde de l’environnement, la prévention des épidémies et l’alimentation.
Tiens, l’alimentation! Intéressons-nous à cet enjeu puisque le blog, où vous vous trouvez, a été créée pour traiter de l’alimentation en générale.
Je ne suis pas coutumier des réalités d’ailleurs, je ne vais donc pas m’y étaler. En revanche je sais que dans ma ville rien n’est fait pour sensibiliser les gens au fait que leur alimentation n’est pas sans conséquence sur l’environnement ou sur le traitement des déchets. Je me rends compte que les déchets sont entassés sans être triés et que la demande du charbon de bois n’a jamais été aussi élevée. C’est à peine si un citoyen lambda est tout à fait conscient du problème.

A mon avis, en ce début du 21è siècle, un bon citoyen est celui qui se rend compte à quel point la survie de son pays passe aussi par la sauvegarde de la planète terre. Ses petits gestes quotidiens comme le fait de s’alimenter ne sont pas dénués de tout lien avec l’avenir du monde. Après tout on n’a pas deux planètes Terre. on n’en a qu’un. Et si l’on en croit les experts elle peut nourrir les 7 milliards d’êtres humains qu’elle abrite.